LES ROUTARDS DANS LE BLIZZARD #InstructorsSummer

Le rythme des saisons et ses travailleurs est un mystère pour bon nombre de gens. Pour certains, une saison en station de ski n’est qu’une pause dans la carrière ou les études, pour d’autres c’est bel et bien un mode de vie établi. Un saisonnier connaît la chanson, et s’amuse de la question récurrente : “Mais que fais-tu le reste de l’année ?” Daniele et Manu sont moniteurs de ski à Oxygène depuis 6 ans. Pour eux la réponse tient en trois mots : voyager, avancer, rencontrer.

Voyager pour embellir sa vie des couleurs du monde

«La vie est un long champ à cultiver. Voyager, c’est y semer la diversité de la Terre. Voyager, c’est l’embellir des couleurs du monde» Ludovic Lesven.

Rencontre avec ces voyageurs dans l’âme, routards aux mollets aiguisés et à la volonté de fer, travailleurs au rythme alterné, toujours en quête de nouvelles rencontres, avec les autres mais aussi avec eux-mêmes.

Daniele voyage en vélo depuis plus de 20 ans. Depuis 6 ans, sa femme Manu l’a rejoint et partage maintenant l’aventure avec lui. 5 voyages en tandem, 5 aventures humaines où leur volonté de fer les a aidé à gravir des sommets, des déserts, des jours de beaux temps comme des nuits glaciales en pleine nature.

Daniele nous raconte que la volonté est la clé. “Quand tu es seul durant des jours dans le désert, tu ne fais pas machine arrière. Il n’y a pas de plan B. Il n’y a qu’une route, c’est celle qui te ramènera vers la prochaine ville, vers le prochain point d’eau, et donc vers la vie. Alors tu avances, c’est tout.”

Comment choisissent-ils leur destination ?

Avant de se lancer, Daniele et Manu réfléchissent à leur prochain voyage en couchant sur le papier les critères de l’aventure recherchée, pour peser les pours et les contres de chaque destination. En tête de liste, le critère principal, ce sont les gens et leur culture. “On ne part pas pour pédaler et faire une performance physique, sinon on resterait chez nous. Il y a bien assez de montagnes à gravir ici. Ce que l’on recherche, c’est avant tout les rencontres.”

Toujours dans des endroits reculés, Daniele et Manu sont en quête d’authenticité, et veulent être confrontés à la réalité des cultures, à la vie de tous les jours des populations locales.

Des voyages initiatiques

Victor Hugo écrivait : Voyager, c’est naître et mourir à chaque instant.”

En Afrique, ils ont été frappés par les coutumes de la population, et par leur joie de vivre. Après avoir traversé le le Malawi, la Zambie et la Tanzanie, ils sont arrivés dans le Coeur de l’Afrique. Cette région est nommée ainsi à cause de la population qui y habite. “Ces gens n’ont rien, mais ils vivent si intensément. Nous, en Europe, nous avons tout et passons notre temps à nous plaindre du moindre manque.” Le voyage remet les choses à leur place, casse les préjugés et les privilèges que nous pensons acquis de droit.”

Voyager en vélo forge le mental. A ceux qui pensent ne pas être capables de partir, Daniele insuffle la passion du voyage et des rencontres, ainsi que la motivation. “60% de la route est parcourue grâce au mental. Oui, c’est physique, mais le corps accomplit tous les exploits quand on est maître de ses pensées et émotions.” Daniele a passé des cols parmi les plus hauts du monde, à plus de 5 000 m d’altitude (Bolivie, Pamir et Ladhak). Il a traversé des déserts de glace et de feu, et en est sorti avec une nouvelle approche de la vie. Le “Connais-toi toi-même” de Socrate ne saurait prendre plus de sens.

Quelle rencontre a été la plus marquante ?

“Arborants leurs plus beaux vêtements, ils se tenaient face à nous. Droits, le regard empli de fierté. Jeunes et anciens se tenaient côte à côte, ils prenaient la pause.” nous raconte Daniele.

Lors de leur voyage en Afrique, ils se sont arrêtés près d’un village. Les habitants les ont conduits au chef du village afin de lui demander l’autorisation de dormir là, dans leur tente. Les habitants étaient passionnés par leur venue. Nos voyageurs ont échangé quelques mots avec le chef et sa famille le soir autour d’un repas, la reconnaissance et le partage au coeur de toutes les discussions.

“Pour nous, Européens, il est normal d’être reconnaissants lorsque quelqu’un nous ouvre sa porte.” nous dit Daniele, l’air pensif. “Dans ce village, le chef nous a accueilli à sa table, a partagé son repas avec nous, nous a permit de refaire un plein d’eau et de provisions. Il était encore plus heureux que nous de cet échange. Le lendemain, au moment de partir, il est venu nous chercher, les larmes aux yeux. Il nous a longuement remercié d’être venus les voir et d’avoir partagé une journée et une nuit avec sa tribue.”

“Le chef pleurait” nous explique Daniele. Il pleurait de joie en nous remerciant d’avoir apporté la joie dans sa famille et son village. Ceci est inconcevable pour nous. Ces gens ont le coeur sur la main, et n’ont pas peur de montrer leurs sentiments et d’ouvrir leurs coeurs à des étrangers.” Le chef est alors allé chercher sa famille; tous se sont vêtus de leurs plus beaux vêtements pour que Daniele et Manu puissent prendre une photo d’eux, pour que les voyageurs n’oublient jamais cette rencontre.

“Il nous a demandé de revenir, et nous a dit que ce village était maintenant comme notre maison. Ce n’était pas des paroles en l’air, ce n’était pas de la politesse comme on rencontre chez nous : c’était sincère.”

Risquer l’aventure, mais à quel prix ?

“Ils criaient, se disputaient. Sans comprendre un mot de leur langue, nous savions qu’ils débattaient de notre sort. Notre destin était entre leurs mains et j’ai pensé “Voilà, c’est fini.””

Lors de ses voyages en solo, Daniele s’est retrouvé quelquefois dans des situations critiques. Une rencontre inattendue avec un ours l’a laissé de marbre lors de sa traversée de la Sibérie. Lors d’un autre périple, il s’est cru perdu au milieu du Tibet, les paysages inchangeants sur des centaines de kilomètres ont eu raison de son sens de l’orientation. Durant plusieurs jours il a dû combattre son esprit pour garder le moral et la force d’avancer. Mais une fois, une seule, il a cru que l’aventure s’arrêtait là.

Daniele et un cycliste suisse rencontré sur la route avaient monté la tente dans un endroit reculé, en plein désert, proche de la frontière Afghane. Réveillés en pleine nuit par une masse de locaux, il a joué sa vie. Pris entre deux clans, leur destin se jouait à un fil. “Je ne comprenais pas ce qu’ils disaient, le débat a duré près d’une heure qui m’a semblé une éternité. J’ai pensé “Voilà, c’est fini. C’est comme cela que ça se termine. Là j’ai vraiment eu peur pour ma vie.” Que peut-on ressentir quand la vie nous échappe, qu’un groupe d’individus hurlent, et se disputent votre peau ? Solitude ? Abandon ? Regret ? Pour Daniele ce fût de la résignation, accepter le fait d’avoir joué et perdu.

Au bout d’un moment l’un des clans a fait venir la police locale, qui les a raccompagné en lieu sûr.

Malgré ces quelques situations, Daniele attend l’été avec impatience afin de repartir à la conquête des grands espaces et redécouvrir cette liberté du corps et de l’esprit qui les attend sur la route.

Le projet de cette année ?

Le Tibet, l’Himalaya. Cette année ils ne partent pas en tandem comme les 5 années précédentes, cette fois ils font vélo à part. Ils auront 3 mois et 3000km devant eux. Là bas les rencontres avec le peuple promet de beaux partages. Un voyage initiatique de plus au compteur de nos routards dans le blizzard.

Leurs voyages en chiffres :

  • 20 ans de voyages
  • Les cols les plus hauts du monde
  • dont 3 à plus de 5000m (Bolivie 5400m, Tibet 5400m, Ladhak 5600m)
  • Un tandem : 80kg
  • 1000km par mois en voyage
  • 60km par jour

Daniele et Manu partagent en live toutes les péripéties de nos routards, quand la connexion internet est accessible, sur leur page Facebook.

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